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La (new) Cadillac Database^©

La Cadillac Eldorado Brougham
1957 - 1960

4ème Partie
La Brougham du gratin

Réflexions sur le coupé-chauffeur spécial
Eldorado Brougham de 1956

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(à gauche - en arrière plan) très rare dessin du coupé-chauffeur Brougham. au Styling Studio, 1955
(à droie)  l'auto terminée,  présentée au Salon de l'Auto à Paris en octobre 1956

Le "Motorama" de la General Motors est passé en tournée en 1956 dans les grandes villes américaines suivantes : New York, Miami, Los Angeles, San Francisco et Boston. Cette année battit les records de fréquentation (la plus élevée des huit Motoramas organisés par la GM entre 1949 et 1961), atteignant un total de 2.348.241 visiteurs. Il y était présenté le prototype Eldorado Brougham à quatre phares de 1956 et un autre "dream-car", le "coupé-chauffeur Eldorado Brougham" connu au service de style de la GM sous le nom de modèle expérimental n°XP-48 (commande spéciale n°2491). Le prototype de la berline Eldorado Brougham revenaient tout juste du salon de Paris 1955.

Représentation artistique du coupé-chauffeur, apparu sur une pub d'époque
qui annonçait une exposition spéciale des modèles Cadillac de l'année 1956

 

Un communiqué de presse a été réalisé par Cadillac à l'occasion de la tournée du Motorama [# O'Hp 4 11056, c'est-à-dire 10 janvier 1956], qui débute ainsi :

La Cadillac Motor Car Division présentera son "dream car" expérimental Eldorado Brougham coupé-chauffeur au Motorama 1956 de la GM qui débutera au Pan-Pacific Auditorium de Los Angeles le 3 mars [1956]. Cette voiture distinguée avec chauffeur est un modèle cousin de la berline hautement personnalisée Eldorado Brougham dont la production en série limitée est prévue plus tard dans l'année.

Dans la suite de ce texte, l'"ortaugraffe" et la "gramère" (dans le texte anglais) du rédacteur laissaient quelque peu à désirer. Heureusement, par la suite, une autre personne vint améliorer le style et l'orthographe dans le texte promotionnel suivant :

En combinant un design contemporain aux caractéristiques remarquables d'un classique coupé-chauffeur, ce modèle expérimental personnifie la tendance moderne en matière de véhicules de luxe.

Sa silhouette d'un luisant noir d'ébène parfaitement proportionnée est basse et gracieuse, et mise en valeur par les fins chromages de l'encadrement des vitres, des bordures du toit et des montants de portières.

La faible hauteur totale de la voiture est accentuée par les lignes lisses des ailes avant et par les ailerons arrière caractéristiques des Cadillac.

Une moulure de caisse, partant vers l'arrière à partir de l'extrémité des ailes avant jusqu'à la "ceinture" verticale du bord arrière des portières avant donne du relief à l'étendue lisse du panneau latéral.

Une prise d'air, de la largeur du capot, située sous le bord inférieur du pare-brise apporte au compartiment arrière l'air nécessaire à son système de ventilation, de chauffage et de climatisation.

Des prises d'air auxiliaires, de type aéronautique, sont intégrées au sommet de chaque aile avant et aident au refroidissement du compartiment moteur.

Les ailes arrière sont en forme d'ailerons inversés.

De fins profilés chromés vont du milieu de la portière arrière au bloc des pare-chocs arrière.

Les jantes chromées étincelantes sont des Kelsey-Hayes, dessinées comme des ailettes de turbine. La forme particulière des branches leur a valu la désignation "sabre-spoke" [à branches en sabre] à leur première apparition sur le cabriolet Cadillac Eldorado en 1955.

[Photo: © 1956, GM/Cadillac]

La pureté de l'avant de la voiture, du même dessin que celui de la berline Eldorado Brougham, est renforcée par le contour lisse d'un capot moteur exceptionnellement bas. La grille de calandre en nid d'abeilles inclinée vers l'avant est tapie entre les pare-chocs "à obus" disposés en "ailes de mouette".

Des antibrouillards rectangulaires sont placés en retrait sous la partie extérieure des pare-chocs.

Le coupé-chauffeur dispose de deux pare-chocs arrière chromés séparés. Intégrés à la caisse comme aux éléments structurels du châssis, ils ne brisent pas la ligne du coffre, qui descend jusqu'au bas de la carrosserie.

Les tubes d'échappement passent par des sorties ovales situées sous chaque aileron.

La partie intérieure des pare-chocs contient les feux de recul et les combinés clignotants / feux stop. Les feux arrière sont intégrés au rebord vertical fuselé des ailerons.

De nouvelles méthodes de construction, en particulier un tout nouveau dessin du châssis, ont permis de réduire toutes les dimensions extérieures sans sacrifier le confort des passagers [ou du chauffeur].

Les dimensions extérieures sont :

Longueur 219,9 pouces [5,58 m], hauteur 55,5 pouces [1,41 m]

Largeur 78,8 pouces [2 m] Empattement 129,5 pouces [3,29 m]

Contrairement à la berline Eldorado Brougham, construite classiquement en acier, la carrosserie du coupé-chauffeur est entièrement en fibre de verre.

Le toit du compartiment passagers est recouvert du traditionnel cuir noir verni. Le compartiment du chauffeur est entouré de cuir noir grené.

Dans le compartiment avant [du chauffeur], deux sièges baquet individuels à assises à ressorts revêtus de cuir noir souple du Maroc capitonné sont fixés à la cloison de séparation. Aucun réglage latéral n'est possible.

     
[Photo: © 1956, GM/Cadillac]

Le noir du cuir et de la peinture unie de la planche de bord est brillamment mis en valeur par le chromage des encadrements de compteurs. Le classique "blason" Cadillac, bordé d'argent, est au centre d'un volant à jante noire et branches chromées.

Une capote de protection du chauffeur en cuir façon sellier est rangée dans le coffre. Lorsque le temps se gâte, elle se met en place par coulissement sur deux rails latéraux.

Le panneau entre les sièges avant contient un interphone permettant de communiquer avec les passagers assis à l'arrière.

Le compartiment arrière est luxueusement tapissé en noir et beige. Les portières arrière sont garnies d'un épais cuir noir, et la banquette arrière est capitonnée en drap beige. Celui-ci se marie à la moquette en haute laine beige et au ciel de toit en drap beige.

Toute la visserie du compartiment arrière est dorée.

Dans la cloison de séparation se trouve tout le "nécessaire de confort", entre autres le radio-téléphone pour communiquer avec le chauffeur, la climatisation, une boîte à maquillage, un humidificateur de cigares, une bouteille Thermos et des verres assortis.

Deux soufflets à journaux sont au bas de la cloison de séparation.

L'intégration d'équipements à la cloison de séparation n'a pas permis l'installation d'une vitre de séparation électrique descendante. Elle est remplacée par une vitre coulissant horizontalement.

Sur ce "dream-car" exceptionnel, les poignées de portières contiennent des micro-interrupteurs qui permettent l'ouverture des portières sans effort. Dans un souci de sécurité, les interrupteurs sont désactivés quand la voiture est en mouvement, ce qui empêche une ouverture accidentelle des portières.

Le verrouillage à clé d'une des portières verrouille automatiquement les trois autres et provoque le relevage de toutes les vitres en position fermée.

Un examen superficiel pourrait laisser penser que la berline et le coupé-chauffeur Eldorado Brougham sont identiques dans leur partie avant, jusqu'au pare-brise. Ce n'est pas le cas.

En dehors du fait que la carrosserie du coupé-chauffeur est en fibre de verre, le pare-chocs avant est en tôle formée à la main, et non en métal moulé. A l'inverse de la berline, le coupé-chauffeur n'a pas de suspension à coussin d'air. Et s'il a l'air plus "encombrant" que la berline, la différence n'est que de 4 pouces [10 cm] en longueur et un demi-pouce [1 cm] en hauteur."

 

Bien que les critiques auto de l'époque aient spéculé sur la production en série limité du coupé-chauffeur Eldorado Brougham, on ne l'envisageait pas sérieusement chez Cadillac, en dépit du fait que le coupé-chauffeur ait fortement capté l'attention du public au salon de Paris et après, et pendant la tournée du Motorama 1956.

En fait, le "coupé-chauffeur Eldorado Brougham" avait été construit uniquement pour être exposé. Comme le prototype Eldorado Brougham de 1956, il n'était pas fonctionnel, c'est-à-dire que la voiture n'avait ni moteur, ni équipement mécanique ou électrique. De plus, ce dream-car n'avait pas la suspension à coussin d'air, source de problèmes.

Ci-dessus, l'une des photos publicitaires les plus connues du coupé-chauffeur, prise à Miami pendant la tournée du Motorama 1956

Qu'est-ce que ça peut bien être ? 
Un cabriolet Brougham en pleine restauration ?

 

 
...et ceci?  Vous avez une idée? ...et l'auto ci-dessous?

           
Le document sur lequel figurent les points d'interrogation (ci-dessus) montre l'arrière du coupé-chauffeur Eldorado Brougham en cours de restauration, avant la mise en place du pavillon; en revanche les photos suivantes
nous montrent la curieuse Chevrolet "El Morocco", la "Brougham du pauvre"

Qu'est-il advenu du coupé-chauffeur ?

En racontant l'histoire de cette voiture, Cy Strickler, ancien président de la défunte Brougham Owners Association (BOA) [association des propriétaires de Brougham], disait dans MC de l'automne 1974 "une seule fut construite, et elle n'existe plus." Dans un autre article, il écrit "quel dommage qu'une voiture si magnifique ait disparu à jamais." Pourtant, il ajoute, comme s'il avait une prémonition soudaine, "mais qui sait, peut-être qu'un jour, quelque part..." Dans un article sur l'Eldorado Brougham, co-écrit par Cy dans "Car Collector" de mars 1978, il ajoute : "comme c'était l'usage, la GM envoya le coupé-chauffeur à la casse plusieurs années plus tard, mais une rumeur persistante situe ses restes dans une ferraille retirée de Detroit."

 

En fait, la prémonition de Cy et la "rumeur persistante" dont il parle se sont révélées entièrement fondées. Le coupé-chauffeur Eldorado Brougham 1956, qui était effectivement voué à être détruit - comme l'étaient la plupart des dream-cars et voitures d'exposition après le Motorama - a miraculeusement survécu : voyez plutôt les photos à la fin de cette section pour apprécier le travail mis en oeuvre pour restaurer cette voiture !

Depuis le début des années 70, un petit groupe de passionnés savait que le coupé-chauffeur et quelques autres modèles uniques du Motorama avait été sauvé de la destruction. Cet exemplaire unique avait été soigneusement mis de côté par un employé prévoyant de l'entreprise de démolisseurs Warhoop's de Detroit, à côté du centre technique de la GM, établissements chargés par le géant de l'automobile de ferrailler les dream-cars à la fin de leur tournée du Motorama.

Nombre de tentatives de rachat des survivantes du Motorama auprès de cette casse se sont soldées par des échecs. Enfin, à la fin des années 80, le patron de la casse accepta d'en vendre un lot - parmi lesquelles le coupé-chauffeur Cadillac - à Joe Bortz, un collectionneur de Highland Park, dans l'Illinois. Joe est CEO de la société de spectacles "Blue Suede Shoes". Sa collection de dream-cars GM est aussi enviable que celle qu'entretient le musée Sloan de Detroit qui abrite entre autres la "Y-Job" et "Le Sabre" sur base Buick, la "Firebird" GM et la "Cyclone" de 1959, une Cadillac fortement modifiée.

Joe vendit ensuite le coupé-chauffeur à Roy Warshawsky de l'organisation J.C. Whitney.

          
Cela n'arrive qu'une fois dans la vie d'un fanatique de l'auto d'en trouver une comme celle-ci dans une casse
[ Photos: © Joe Bortz ] 

  
(à gauche) Telle qu'à sa sortie de la casse Warhoops de Detroit. La voiture est triste à voir. 
(A droite) Feu Roy Warshawsky avait commencé à restaurer la voiture mais sa santé l'empêcha de terminer le travail

Des nouvelles du rare coupé-chauffeur furent données par le "self-starter", le mensuel du Cadillac-LaSalle Club, en juin 1991. Roy avait confié sa restauration aux ateliers Fran Roxas d'Alsip, dans l'Illinois, à côté de Chicago. Il voulait faire du coupé-chauffeur un véhicule roulant, bien que ce ne soit qu'un modèle d'exposition. Il trouva un moteur et une boîte de Cadillac 1956 (au départ, le coupé-chauffeur n'en avait pas), et fit frapper un numéro de série de Brougham (CB) sur le carter de boîte.

Fran Roxas effectua certains travaux de restauration pour Roy Warshawsky entre 1991 et 1994 ; entre autres, il remplaça toutes les pièces de bois de la voiture et fit refaire par une société californienne des butoirs de pare-chocs arrière (les originaux étaient en acier, formés à la main et soudés, et étaient bien rouillés après des décennies en plein air dans la casse). La structure du toit fut aussi totalement restaurée avec du bois neuf. Il paraîtraît que ce début de travail a coûté 50.000 dollars.

Mais malheureusement, Roy fut victime d'une attaque cardiaque et dut interrompre la restauration. La voiture fut ramenée aux entrepôts J.C. Whitney au milieu des années 90.

En août 1996 l'auteur de ces lignes vit sur Internet une annonce pour vendre le coupé-chauffeur, faite par un commissaire-priseur bien connu, Dean Kruse and associates.  C'est à la vente aux enchères Kruse que Dick Baruk, membre de la BOA, le vit la première fois. Un autre membre de la BOA, Larry Muckey, qui suivait le coupé-chauffeur à la trace depuis quelque temps, le persuada de l'acheter.

Un encadré sur la découverte du coupé-chauffeur fut publié dans Auto Week du 8 janvier 1999 (couverture et pp. 22-25) ; il faisait partie d'un article sur les dream-cars de la GM.

 

Dernier complément !!!

Avec les conseils de Larry et d'autres personnes qui connaissaient les nombreuses caractéristiques originales de la voiture, Dick acheva dans le plus grand secret son "travail d'amoureux", commencé deux ans auparavant.  Selon Larry, le coupé-chauffeur est restauré complètement et à la perfection dans sa beauté première. Tous ses aménagements y sont, dont la visserie plaquée or dans le compartiment arrière.

D'après les photos que Dick et Larry ont eu la gentillesse de m'envoyer pendant et après la restauration, la voiture est aussi belle maintenant qu'elle l'était à sa première présentation au salon de Paris à la fin de 1955. Elle est SUPERBE ! Maintenant, le monde entier peut admirer à nouveau cette "Brougham pour le gratin" ... que le "gratin" de la GM avait ordonné de détruire il y a plus de quarante ans mais qui a miraculeusement survécu.

Les photos ci-dessous sont reproduites avec l'aimable autorisation du propriétaire de la voiture, Dick Baruk; elles sont © 1998 et 1999 Dick Baruk et Larry Muckey.  Larry a été associé de près à la restauration de cette voiture. Il connaît toute son histoire mieux que personne.

 

     

(ci-dessus) la restoration avance ; le pavillion est posé aprè garniture ;  la calandre est aussi en place        

 
Le coupé-chauffeur Eldorado Brougham se distingue par sa petite lunette arrière,
ses roues "sabre" - type "Motorama" - et ses moulures de portière et de bas de caisse

     
(à gauche) ciel en brocart tissé de fil d'or ; (au centre) emplacement de choix pour la plus élégante des automobiles ;
(à droite et ci-dessous) le pare-chocs arrière n'est pas le même que sur les berlines Eldorado Brougham de série
(Ci-dessus) : il valait la peine de persévérer : 
le glorieux coupé-chauffeur Eldorado Brougham

   
(ci-dessus, à gauche) : compartiment chauffeur nouvellement garni de cuir noir Morocco ; (au centre et à droite) la place
du chauffeur et le somptueux habitacle arrière avec ses cantines encastrées et ses dorures en profusion

 
(ci dessus) Comparer ces vues plongeantes avec les photos prises à l'occasion du Salon de Paris 45 ans plus tôt

   
(ci-dessus) :  trois clichés supplémentaires qui montrent le somptueux habitacle

(ci-dessus et ci-dessous) : les trois photos les plus récentes du coupé-chauffeur Eldorado Brougham de 1956
 



(ci dessus et ci-dessous) : la reine (au centre) entourée de quatre membres de la famille royale Cadillac
(collection Dick Baruk)

 

AVANT-DERNIERE HEURE [février 2000]

La revue mensuelle Car Collector du mois de février 2000 comporte en pages  34-39 un très bon papier sur ce modèle ainsi que plusieurs parmi les photos présentées ci-dessus. 

 

DERNIERE HEURE (Avril, 2003)

La Cadillac Eldorado Brougham "Town Car", modèle d'exposition, fut proposée aux enchères sur "e-Bay" et aurait changé de mains. Dans la mesure où son nouveau propriétaire me l'autorise, je signalerai l'endroit où elle repose désormais.

 

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© 1996, Yann Saunders et le Cadillac-LaSalle Club, Inc.
[Image de fond : le coupé-chauffeur spécial Eldorado Brougham de 1956]